mercredi 9 juillet 2014

Les caprices du Dieu Football

Les voies du football sont décidément impénétrables. L'élimination sans appel du Brésil en demi-finale par l’Allemagne hier soir marquera plus durement cette Coupe du monde que le résultat de la finale dimanche prochain. Pour trois raisons.

D’abord, comme un annonceur qui, s'étant payé à un prix d'or une pleine page de publicité dans un journal, s’attend à un rédactionnel élogieux, le Brésil ne pouvait concevoir de perdre en tant que pays hôte. Véritable terre promise du football, protégée des Dieux ! Et c’est pourtant ce qui s’est passé. Tant que la Seleçao passait les étapes, l’hospitalité brésilienne redonnait un sens à la fête et plaçait sous silence les histoires de gros sous. Or, les larmes de la défaite risquent de réveiller les rancoeurs. Et la présidente Dilma Rousseff en paiera certainement le prix aux prochaines élections d’octobre, à l'image de ce qui l'attend lors de la remise du trophée.

Ensuite, engagé dans une partie de poker, le Brésil a fait tapis avec une tactique de jeu risquée. Jusqu'ici, il avait toujours misé sur une carte maîtresse, Neymar, le porte-bonheur de toute une nation. Mais celui-ci blessé dans des conditions troubles, le plan reposait sur un coup du sort. Des témoins sur place soulignent l’optimisme quasi mystique dont ont fait preuve des supporters brésiliens, prêts à tout pour croire à un retournement miraculeux. Mais la foi n'a pas suffi. En face, il y avait une équipe allemande d'une redoutable technicité. En fait, cette Coupe du monde aura prouvé que la divinisation de quelques joueurs au détriment d’une collégialité de jeu n’est plus la stratégie gagnante pour défier le destin. A moins que l'Argentine prouve le contraire avec Messi.

Enfin, dernier enseignement, à notre compte. L’humiliation du Brésil par l’Allemagne relativise l'échec de la France. Elle souligne même ses atouts. A la relecture des scores, l'honneur des Bleus ne s'en sort pas si mal même si les mauvaises langues regrettent encore les occasions manquées. Le premier d’entre eux est sans doute un président impopulaire qui espérait bénéficier d’un « effet 1998 » dans les sondages. L'événement a révélé des joueurs français plus généreux qu'à l'époque d'un certain bus. Et Didier Deschamps, manager providentiel, a réussi la synthèse d’une réconciliation. Une défaite biodégradable dont on jugera les fruits dans la durée.