jeudi 28 février 2013

Le pape qui a montré Jésus

(Vincenzo Pinto / AFP)
Selon le sondage CSA pour BFMTV publié ce jeudi, 6% des Français, toutes sensibilités confondues, estiment que l’Eglise catholique sort renforcée du pontificat de Benoît XVI. Les plus jeunes étant les plus critiques. Quant aux autres confessions et aux sans religion, ils sont respectivement 1% et 2% à saluer l’action du pape. A quelques heures de la vacance du Siège apostolique, ces chiffres montrent à quel point le message d’universalité de l’Eglise en France a encore du chemin à parcourir. Même les catholiques pratiquants réguliers ne sont que 30% à reconnaître un héritage à leur pape. C’est beaucoup mais encore trop peu. Ces résultats traduisent un manque de clairvoyance sur la contribution de ce grand théologien à la doctrine catholique, et plus généralement à la réflexion sur la dignité de l’homme au cœur des crises. "Chacun de nous est le fruit d’une pensée de Dieu" a-t-il écrit dans une homélie. Nous inviter, seul ou en communauté, à de longues et riches méditations : voilà quel a été le rôle fondamental de Benoît XVI.

Les Français regrettent Jean-Paul II et son sens de la théâtralité. Mais Benoît XVI n’a jamais prétendu recevoir aisément la charge pétrinienne à la suite d’un pape si charismatique qui a traversé en première ligne un quart de siècle d’histoire. Pourtant, dans l’ombre de Jean-Paul II, le cardinal Joseph Ratzinger fut l’homme des coulisses, de l’exégèse, la conscience et la droiture de la foi. Devenu pape, Benoît XVI a parachevé l’œuvre de son prédécesseur en maintenant un cap, un point fixe, malgré les tempêtes. Est-ce cela que les croyants lui reprochent : dire la vérité telle qu’elle a été enseignée par le Christ lui-même, malgré les tentations de se fondre dans les humeurs ambiantes ? Les Français sanctionnent-ils des discours jugés trop rigides sur la place de la contraception dans la relation humaine, le respect de la vie naissante, la parentalité homme/femme et la famille comme piliers de la société, les dangers de l’euthanasie ?

Combien parmi ceux qui ont répondu à ce sondage ont lu un texte ou un livre de Benoît XVI ? Ce pape laisse derrière lui une somme de catéchèses d’une incroyable portée universelle, philosophique et spirituelle. Sa plume a montré au monde la dimension humaine du Christ, son visage lumineux, le regard qu’il a porté sur les autres, un regard bienveillant. Indépendamment de sa nature divine, Benoît XVI a expliqué le Christ aux croyants, sa manière de faire fructifier la parole de Dieu sans en changer une ligne. Il a souligné son exemplarité, sa capacité à se distancier des passions et à pacifier les conflits par un travail d’intériorité, de prière et de charité. Les catholiques lui doivent une feuille de route solide pour les prochaines décennies. Une grille de lecture que le futur souverain pontife, sans doute plus démonstratif, devra justifier par une pédagogie ardente, inébranlable et incarnée.

A l’image de la Bible, le cycle de l’Eglise se perpétue : un temps pour écouter Dieu, un temps pour méditer et enseigner sa parole, et un temps pour agir, dans le don de soi et non par la force. Avec, comme fil conducteur, l’Esprit Saint, le souffle d’âme de Dieu sur notre discernement. Selon la prophétie de Saint Malachie, le successeur de Benoît XVI serait le 112ème et dernier pape avant la fin du monde. Dans ce texte de cinq pages dont l’origine est attribuée à un moine irlandais, on peut lire : "Dans la dernière persécution de la Sainte Eglise romaine siègera Pierre le Romain qui fera paître ses brebis à travers de nombreuses tribulations. Celles-ci terminées, la cité aux sept collines sera détruite, et le Juge redoutable jugera son peuple." Une allusion à la fin de l’Eglise, au jugement dernier ? Interrogé sur cette vision catastrophiste de cette prédiction, un prêtre m’avait répondu : "Que pourrait-il être envisagé dans la prophétie de Malachie ? La destruction de la Rome païenne, c’est-à-dire l’éradication du monde qui s’est éloigné de Dieu, qui préparerait le retour du Christ en gloire, son renouveau. Ce qu’on appelle la fin des temps et non la fin du monde". Une parole d’espérance ?