Dans la crise de confiance qu’ils traversent, les Français sont dans
l’œil du cyclone. D’après un sondage Ipsos pour Le Monde*, ils ont peur de l’avenir et peur de l’autre. Un sondé sur
deux estime que la France est marquée depuis 10 ans par le déclin économique et
perd son rayonnement culturel dans le monde. Ainsi, la mondialisation est
perçue sur l’hexagone comme une menace grandissante contre laquelle se
barricader. Bousculés dans leur identité, la majorité de nos compatriotes ont
perdu la capacité à se projeter dans la durée. Mais comment dépasser ce drame
existentiel ?
Les projets de société ne visent pas loin, supplantés par l’immédiateté et
l’émotionnel. Animés d’un principe de précaution qu’ils ajustent à
leurs intérêts, nos gouvernants n’imaginent pas suffisamment les générations de
demain ni d’après-demain. Sans doute les fruits de l’alternance. En France, le
Président du "changement pour maintenant" rechigne à mesurer toute la
portée de ses promesses électorales au prétexte que la démocratie s’est
exprimée dans les urnes. Et alors ? Le débat serait-il désactivé sitôt
passé le verdict du suffrage universel ? Conséquence : indifférent,
parfois méprisant, à l’égard de certaines contestations, le chef de l’Etat, en
quête d’autorité, applique son programme à la lettre au risque d’attiser les
frustrations des uns et de renverser les repères des autres.
Désavoués par l’opinion publique,
les politiques préfèrent alors se reconstruire une mythologie sur le spectacle
de l’information, offrant au monde surmédiatisé de grands symboles et de
petites polémiques : affaire DSK, crise de gouvernance à l’UMP, conflit au
Mali, Florence Cassez. Mais, dans une France coupée en deux, ni la
radicalité, ni l’enfumage ne sont la solution. Au contraire, ces stratégies de
communication contaminent nos gènes par le repli sur soi et les réactions
égoïstes.
Qui paie les frais de nos excès de nombrilisme ? A l’échelle mondiale, la
tentation du "chacun pour soi" épuise la planète de ses ressources.
Combien de sommets internationaux sur le développement durable ont tourné au
fiasco tant les pays, inégaux devant le progrès, sont incapables de convenir
d’une politique industrielle et environnementale soucieuse de notre futur à
tous ? Alors, les injustices soufflent sur les braises de l’impatience.
D’où les mouvements de populations qui entrent en collision. En fait, ce qui se
passe sur terre tend à ressembler à ce qui se passe en-dessous. Une tectonique
des hommes, en quelque sorte, qui provoque des fractures et des tremblements sur
les zones de rencontre. Alors, à l’endroit où les civilisations
s’entrechoquent, la peur de l’étranger refait surface.
Selon le même sondage Ipsos*, 70%
des Français estiment qu’il y a trop d’étrangers sur notre territoire. En outre,
le poids de l’immigration n’est plus vécu sur le théâtre du travail mais sur
celui du religieux. En effet, 74% des personnes interrogées jugent par exemple la
religion musulmane « intolérante » et incompatible avec les valeurs
de la République. Mais un homme déboussolé tombe souvent dans le piège des amalgames. Derrière la peur de l'islam se cache le spectre de l'intégrisme dont la menace augmente au fur et à mesure que notre armée s'engage "hors les murs" dans une guerre contre le fanatisme. Comment dans ce cas apporter de la distance pour
garder les idées claires et l’espérance intacte ?
Il est temps de changer notre rapport au monde et d’inscrire la
relation humaine dans un autre questionnement philosophique. L’homme est
inconfortable avec l’idée qu’il soit le fruit du hasard. S’impose donc à lui une
quête de transcendance pour l’aider à trouver un sens à sa vie. Les plus
fatalistes s’en moquent et se complaisent dans une fausse réalité où comptent
la jouissance des biens matériels, la surconsommation et le bonheur payé à prix
d’or. Les plus inspirés s’efforcent de faire face à leurs responsabilités sur
la base d’une question fondamentale : qu’est-ce que Dieu attend de nous ?
Un regard plus sacré sur le rôle de notre humanité qui permet de voir plus
loin, plus longtemps. La réponse est urgente.