Les Français se passionnent pour un
nouveau "fait divers" à rebondissement. Le meurtre d’une famille
anglaise sur le parking d’une route forestière, à Chevaline, près du lac d’Annecy.
Une fois encore, un violent massacre
d’une famille, où les enfants ne sont pas épargnés, a lieu dans une région
montagneuse, un décor romanesque, hostile, à faible densité de population, difficile
d’accès, où les pistes se multiplient et se perdent dans des forêts sombres,
sur des routes isolées. En 2003, c’est l’affaire Flactif qui défraie la chronique.
Un couple et ses trois enfants âgés de sept à dix ans sont retrouvés
sauvagement assassinés dans leur chalet du Grand-Bornand. Une publicité dont le
charmant village savoyard se serait bien passé. L’été dernier, à Bozel, en
Savoie, un jeune homme de 23 ans abat froidement son père et son frère de 8 ans
avec une arme à feu, blesse son deuxième frère et frappe sa mère. Alors, la
montagne, terre de sang ?
Le drame d’Annecy vient réveiller
les fantômes de l’affaire Dupont de Ligonnès. Un mystère non élucidé dans lequel
la famille des victimes crie au complot. Depuis ce matin, les médias rapportent
en boucle les avancées de l’enquête. La découverte tardive d’une miraculée de 4
ans. Ce qui suscite l’intérêt, ce sont surtout les explications techniques et
scientifiques du procureur. Car, avec les séries télé comme les Experts ou, plus authentique, Engrenages, on se croit familier du
jargon du métier et des procédures : "geler" la scène de
crime, ne pas toucher aux corps, modéliser en 3D la trajectoire des balles,
interroger les témoins,… Petit à petit, le puzzle se met en place. Le "fait
divers" vient d’échapper à la réalité pour devenir scénario de polar.
Enfin, les médias jouent à
nouveau un rôle majeur dans la représentation dramaturgique du macabre. Les dépêches
font figure de catharsis. Et le temps médiatique prend du retard sur le temps judiciaire.
Un décalage nécessaire. Les enquêteurs savent que les auteurs de la fusillade
écoutent la radio. La famille et le cycliste tués se sont-ils trouvés au
mauvais endroit au mauvais moment ? C’est une piste privilégiée par les
enquêteurs selon laquelle ils auraient dérangé des trafiquants de drogue en
pleine transaction. Le scénario semble rocambolesque. La presse britannique,
comme The Sun ou le Mirror, évoquent la possibilité d’un braquage
qui aurait mal tourné. A coup sûr, l’événement risque de tenir nos deux pays en
haleine dans les heures qui viennent.