Victor Hugo appelé à la rescousse ! Brisant l’embargo de 20h, l’écho
d’une voix romanesque a résonné à la Rochelle. Point d’orgue de ces élections
législatives, le mot "trahison" a fait trembler les tours du
Vieux-Port. Pour annoncer sa défaite, sans faire ombrage à la déferlante rose,
Ségolène Royal n’a pas ménagé son style. A l’antenne, pour les ténors de son
parti, c’était l’agneau pascal contre la brebis galeuse. Pour ses adversaires,
l’inverse. Or, même relative, la chute de Ségolène Royal n’en reste pas moins
symbolique.
On aurait dit Jacques de Molay sur le bûcher, le dernier grand
maître des templiers qui, en 1314, au moment de périr sous les flammes, aurait prononcé
cette célèbre imprécation : « Pape Clément ! Roi Philippe !
Avant un an, je vous cite à paraître au tribunal de Dieu pour y recevoir votre
juste châtiment ! Maudits ! Maudits ! Tous maudits jusqu’à la
treizième génération de vos races ! ». Combien de personnalités du
monde médiatique et politique, jusqu’au plus haut sommet de l’Etat, ont été
visées par la complainte du soldat rouge ? Sans doute, est-ce toute la
classe politique française, à commencer par l’autorité gouvernementale, qui
sera marquée du sceau de cette malédiction.
Avec les pleins pouvoirs, la gauche est condamnée à relever la France de
la crise. Surtout, donner le cap des valeurs pour les générations futures, et non en briser le socle, sans faillir aux promesses démagogiques de
présidence "normale". Quant à la droite, faute de pouvoir de blocage,
elle devra exercer son opposition par l’interpellation de l’opinion publique et
la pédagogie des risques. Rebâtir son nouveau projet de société pour
2017. Rétablir la confiance et la solidarité, autrefois marque de fabrique
des grands rendez-vous de l’histoire.
Enfin, l'abstention est sans aucun doute le premier marqueur de
cette malédiction politique. Les citoyens ne se reconnaissent plus dans
leurs élus. Et la plupart ont payé le prix d’un manque de sincérité idéologique : François Bayrou, Jacques Lang, Nadine Morano, Jean-Luc
Mélenchon et surtout Marine Le Pen, renvoyés à leurs tactiques nombrilistes. Une
fois de plus, le verdict des urnes a éclairé le fossé entre Paris, où tout se
décide, et les régions, où tout se mérite. Face aux enjeux qui l'attendent, le pays d'Astérix n'a pas dit son dernier mot.