Invité au 20h de France 2 pour commenter l'allocution présidentielle, Laurent Fabius parle de la Libye. Et moi d'entendre "l'alibi", croyant qu'il parlait du prétexte de la crise du monde arabe pris par Nicolas Sarkozy pour justifier son remaniement ministériel. Mais finalement, c'est bien de cela qu'il s'agissait. Outre un nouveau souffle recherché par le chef de l'Etat pour 2012, le remplacement de Michèle Alliot-Marie par Alain Juppé aux Affaires Etrangères, "le premier ministre bis" comme le titrait le JDD d'hier, et le départ de Brice Hortefeux marquent l'aveu d'un bilan sécuritaire et diplomatique désastreux. Faute de s'appuyer sur son puissant réseau d'ambassades (le second dans le monde), la France ne parvient plus à se faire entendre à l'étranger, ni à remonter au Palais les prémices des grands bouleversements géopolitiques. Sa stature internationale, héritage du gaullisme, s'est effritée, en pleine présidence du G20. Or, la victime expiatoire de ce recadrage tient en trois lettres : MAM. Et là, je me dis : mince ! L'inoxydable Michelle Alliot-Marie. La "dame de fer" à la française déboulonnée et mise à terre. Après douze ans et cent six jours de bons et loyaux services. L'un des plus beaux palmarès politiques de la Vème République : Secrétaire d'Etat à l'Enseignement, puis à la Jeunesse et aux Sports, sous le premier ministre Chirac ; Présidente du RPR ; Ministre d'Etat (Défense, Intérieur, Justice, Affaires Étrangères). Et là, la bourde. Elle pense - et elle le dit ! - qu'elle n'est pas ministre quand elle est en vacances. Erreur ! Sous l'œil scrutateur des journalistes, des détracteurs et maintenant de monsieur tout-le-monde avec son smartphone, un élu n'est jamais lui-même, tant qu'il exerce des responsabilités pour la France. C'est horrible mais c'est comme ça. S'en convaincre aurait sans doute évité un "casse-toi, pauv' con" de trop. Alors MAM "pas ministre" fricote avec les futurs ex-despotes et monte dans l'avion qu'elle n'aurait pas dû prendre. Croisant un "Canard" sur sa route, c'est la chute. Quel gâchis ! Elle qui a voulu tenir droit dans ses bottes, à l'instar de sa caricature campée par Nicolas Canteloup, même quand elle se retrouvait face à ses contradictions, jusque dans sa lettre de démission (forcée), n'a pas résisté aux événements internationaux. Et quitte la scène sur un fiasco. Tout ça pour ça. Des années pour la grandeur et quelques heures pour la décadence. Et on ne retiendra que la fin. Telle est la dure loi en politique. Dans quel état d'esprit est-elle aujourd'hui alors que la presse se déchaîne ? Je pense à Napoléon, en captivité sur Sainte-Hélène, qui se demandait, dans le film d'Antoine de Caunes, Monsieur N., comment "un homme qui a eu le monde entre ses mains peut-il accepter de n'être plus rien ?". Il souffle comme un vent d'amertume sur celle qui a failli être premier ministre. Et qui sort par la porte de derrière.