mardi 23 février 2010

L'Egypte vue du rêve



Toutankhamon. Le pharaon le plus célèbre de l'Egypte ancienne, au sarcophage étincelant, n’a pas fini de nous surprendre. Parmi la liste interminable des best-sellers de Christian Jacq - que j’ai eu tout le loisir de dévorer pendant trois longs et rigoureux mois d’hiver en Suède ! -, L’affaire Toutankhamon relate l’incroyable aventure de la découverte de sa tombe dans la Vallée des Rois, par Howard Carter, en 1922. Dans un livre de Bob Brier publié en 1999, Le meurtre de Toutankhamon, mené sous forme d’enquête scientifique et policière, le jeune pharaon du Nouvel Empire aurait été assassiné d’un coup porté à la tête. Sans compter les deux tomes du Mystère de la Grande Pyramide, d’Edgar P. Jacobs, où les deux aventuriers de bande dessinée, Francis Blake et Philip Mortimer, partent à la conquête des trésors des pyramides de Guizeh. Romans, essais, BD, films et documentaires télé : les mystères de l’Egypte ancienne font rêver. Or, il suffit qu’un secret soit levé pour que le pays des pharaons s’élève de nouveau à la une de l’actualité.
Récemment, sous la houlette du Dr Zahi Hawass, secrétaire général du Conseil suprême des Antiquités égyptiennes et familier des médias, des études ont révélé la filiation de Toutankhamon avec Akhenaton, le pharaon maudit, et une sœur de ce dernier. D’autre part, Toutankhamon n’a pas été victime d’un crime mais d’une maladie consécutive à une fracture de la jambe, le coup derrière la tête étant attribué à une mauvaise manipulation des embaumeurs de l’époque. Enfin, les deux corps de nouveau-nés découverts dans la tombe ont bien été conçus par le jeune "pharaon d’or" dans une relation incestueuse avec sa sœur ou demi-sœur, Ankhsenamon. Une "belle" histoire de famille qui vient d’être mise à jour grâce à des prélèvements ADN sur les momies ! Des thèses s’effondrent. D’autres se confirment. L’archéologie marque un pas de plus dans le décryptage des civilisations anciennes. Or, avec les dinosaures et les chevaliers, il me semble que les pharaons remportent un franc succès auprès des enfants. En particulier pour les dieux, les rites funéraires et l'architecture. Si l’Egypte rencontre, à travers son histoire et sa géographie, un tel engouement auprès du grand public, c’est certainement dû à la puissance esthétique et à la stabilité d’une civilisation entièrement tournée vers la spiritualité et la vie éternelle, une forme politique et sociale inconcevable de nos jours, et qui par ses mythes, empreints de magie et de sagesse, a illuminé le monde durant plus de 3 000 ans. Et, aujourd’hui encore, on peut en admirer l’héritage. Balayer le sable pour mettre des trésors à nu. Jouer aux explorateurs. Remonter le Nil à la découverte de temples, de statues et de tombeaux. Comment la civilisation égyptienne s’est-elle organisée autour de son pharaon et de ses dieux au point de mobiliser les hommes à élever des constructions gigantesques qui perdurent et dont les secrets de fabrication nous dépassent ? Voilà la question qui anime les férus d’égyptologie, fait couler beaucoup d’encre et vivre de nombreux tour opérateurs. Napoléon Bonaparte ne s’y était pas trompé. Au pied des pyramides, les siècles nous contemplent. Alors, pourquoi ne pas escalader ces vieilles pierres pour remonter le temps et lever une partie du voile qui recouvre la genèse de l’humanité ?
Je rêve d’un voyage en Egypte ! Pas celui des touristes, débarqués par hordes pour fouler le sol du Ramesseum, une glace à trois boules dans chaque main. Mais celui de Champollion, déchiffreur des hiéroglyphes, de Gustave Flaubert, d’Auguste Mariette, créateur du Musée du Caire, d’Agatha Christie, mariée en secondes noces à un archéologue, ou de Robert Solé, auteur de L’Egypte, passion française, un livre de référence. Mais, comme dirait mon oncle, difficile de sortir des sentiers battus. L’Egypte est traversée par le Nil, une colonne vertébrale autour de laquelle tout s’anime. Passés les bords, c’est du désert à perte de vue. Il faut donc suivre le cours de l’eau et des bateaux de croisière, comme sur une autoroute, un jour de grand départ en vacances. En attendant de dénicher la perle rare, à la bonne saison, il est toujours possible de déchiffrer les signes cachés de l’Egypte à Paris dont la fondation, selon une théorie, serait attribuée au culte de la déesse Isis. Depuis la campagne d’Egypte de Napoléon, en 1798, qui consistait à arrêter les Anglais vers les Indes, Paris s’est laissé enflammer par les récits des savants et des chercheurs. La politique, la mode et l’architecture se sont inspirées de la culture égyptienne. Aujourd’hui, dans le 2e arrondissement, près de la rue du Caire, le promeneur est entièrement dépaysé par un quartier étrange, baptisé « Foire du Caire », aux décorations égyptiennes. Partout, son regard tombe sur un sphinx, un bas-relief, une colonne ou une fresque de hiéroglyphes. De la place du Chatelet, où la fontaine du palmier est alimentée par quatre sphinx, à la place de Concorde et son obélisque de Louxor, en passant par le Louvre, la capitale regorge de souvenirs et de trésors dédiés à l’Egypte ancienne. Il y a quelques années, avec le concours d’une agence spécialisée dans les jeux de piste pour entreprises, j’ai organisé un séminaire pour un petit groupe de 15 personnes, au cœur du Paris égyptien, à la manière du Da Vinci Code. Au programme de l’après-midi : une enquête policière et archéologique, sous forme de rallye en équipe, à la découverte des mystères d’Isis à Paris. Et je garde un souvenir ému de ma visite au British Museum, à Londres, où est gardée jalousement la célèbre pierre de Rosette, laquelle permit à Jean-François Champollion de percer le secret des hiéroglyphes. Récemment, Christian Jacq et Philip Plisson ont signé, aux Editions de la Martinière, L’Egypte vue du ciel, un beau livre de photographies aériennes. Avec un œil quasi d’espion, l’ouvrage est une façon unique de contempler les siècles, de plonger au cœur d’un patrimoine monumental, de toucher du doigt les vestiges du passé. Certains clichés offrent parfois une proximité étonnante avec les décors au milieu desquels on aperçoit, ici et là, un paysan, un pêcheur, un bédouin ou un touriste, sous le soleil rasant du matin ou du soir.
Quand et comment visiterai-je un jour l’Egypte, pour de vrai ? Je ne sais pas.
Mais pour qu’un rêve devienne réalité, il faut d’abord rêver…